« Mon fils, dit alors le magicien àAladdin, descendez ces marches. Vous trouverez une porte ouverte qui vous
conduira dans un grand lieu voûté. Vous traverserez alors trois grandes salles.Vous y verrez des choses merveilleuses, mais ne touchez à rien, sinon vousmourrez aussitôt. »

« Au bout de la troisième salle, uneporte ouvre sur un jardin planté de beaux arbres chargés de fruits. Marchez
tout droit vers l’escalier qui mène à une terrasse. Montez-y, et quand vous y serez, vous verrez devant vous une lampe allumée. Prenez la lampe, éteignez-la,et apportez-la-moi. Au retour, vous pourrez cueillir tous les fruits du jardin
que vous voudrez. Mais rapportez bien la lampe ! »

Aladin est un jeune homme oisif, âgéde 15 ans, orphelin de père et qui vit au crochet de sa mère qui trime pour
subvenir à leurs besoins. Lorsqu’un magicien africain, qu’il rencontre sur le marché, s’improvise comme père de substitution, sa vie va être bouleversée. Le magicien connaît l’existenced’une lampe magique qui se trouve en dessous terre et à laquelle il n’a pas accès. Il sollicite Aladin pour lui ramener ce trésor.
Crédule, Aladin se prête à cette quête, mais ce que n’avait pas prévu le magicien fourbe, c’est qu’aucontact de la lampe, Aladin gagne en discernement et en maturité : il ne remettra la lampe que lorsqu’il sera à l’air libre. Furieux, le magicien l’abandonne à une mort certaine. Aladin, bénéficie, sans le savoir, des pouvoirs de la lampe qui lui inspire les solutions qui lui permettront de sortir de ce mauvaispas. Ce qui fut fait. Il finit par rencontrer en face à face le génie de la lampe qui se met à son service. Aladin devient riche, au-delà de sa condition, il réalise ses ambitions les plus intimes et obtient la main de la fille du
sultan, lui pauvre hère, accède au rang de prince.

Il a rencontré son daïmon . 

Le daîmon est souvent confondu avecle processus d’individuation de Jung : un impératif interne de métamorphose, de croissance et de réalisation, sous l’impulsion duquel l’être unique et singulier peut se rendre visible. Se singulariser ne passe ni parl’originalité, ni par l’excentricité ou autres modalités factices pour sedémarquer de la psyché collective, cela passe par rencontrer son génie personnel qui se trouve dans l’inconscient. Un trésor caché, comme l’indique leconte d’Aladin qui confère à celui qui le découvre la possibilité de se révéler tout autre : Aladin est un jeune adolescent, indolent et oisif qui ne veutpas grandir (le père est mort et avec lui l’énergie de croissance) ; il demeure attaché à sa mère, immature, insouciant et irresponsable, il se contente d’une vie régressive.

À l’adolescence, il rencontre un grand illusionniste qui agit dans et sur le monde par la magie, ce qui séduit l’adolescent, que la facilitéa séduit jusque-là.

Le daïmon, symbolisé par la lampe, se trouve dans les profondeurs de l’inconscient, là justement où l’illusionniste ne peut pénétrer. Cependant, il sait qu’un trésor s’y trouve, mais il répugne àfaire le travail sur lui-même pour l’acquérir. Il veut simplement gagner en opulence et en prospérité au niveau de l’avoir et se moque éperdument de l’être.Il peut se contenter de dérober à l’inconscient un trésor qu’il n’est pas
devenu. Pour se faire, il est prêt à sacrifier la vie d’Aladin, mais ce dernieren quittant le monde de la surface et de l’illusion, pénètre dans les profondeurs de la terre et échappe aux promesses factices du grand illusionniste qu’est le Moi inflationniste.
Au contact de la lampe (l’être des profondeurs) il accède à un autre niveau de conscience et rompt le pacte avecle mage dont il était le jouet. Il rencontre son génie personnel et sa vie s’en trouve transformée.

Pour l'auteure de ce site, il correspond "à la fine pointe de l'âme": ce qu'il y a de plus évolué en l'homme et qui n'a pas été altéré par l'histoire et déformé par l'expérience. Ce matériau inaltérable de la psyché désire s'exprimer, se rendre visible sous une forme unique.

Un daimon, en réalité, n’est pas un démon, bien que la tradition grecque traduise ce concept ainsi. C’est une entité que l’on peut presque concevoir comme un génie, comme un être divin qui pour les Égyptiens était le Ba. Dans l’éthique d’Aristote, le daimon symbolise la vertu et la sagesse, l’essence la plus éclairée de l’être humain, là où le potentiel est caché. Il est la plus haute source de créativité et d'inspiration chez l'homme: le refuge des muses.

Le problème avec cette entité est qu’elle est cachée. Nous l’avons tous à l’intérieur. Nous venons tous dans ce monde avec cette présence dans les profondeurs de l’esprit, qui contient la voix de la créativité, de l’intuition et de la capacité d’innover. Cependant l'histoire personnelle n'est pas toujours propice à ce que ce daïmon s'exprime car il est toujours en avance sur son temps et ne peut pas être compris. Le Daïmon pose la question de savoir ce qui différencie un homme d’un autre homme sachant qu’ils ont un dénominateur commun la vie. Est-ce que chaque homme, à l’identique du gland, qui a pour seul destination le chêne, l’homme est-il dépositaire d’une destination qui est propre à chacun ?

Pour Jung, son daïmon est sa volonté de vivre. Il considère que chaque être humain se dote d’une personnalité façonnée par les exigences du milieu et concomitamment, chaque être humain est appelé à réaliser sa singularité. Pour cela le Processus d’individuation s’active à partir de l’adolescence mais tous les êtres humains

ne répondent pas à cet appel, par ignorance ou par déni ou par flemme ou par lâcheté. Car devenir un être unique et singulier demande du courage et du sacrifice, de la persévérance et de la foi en quelque chose de plus grand. Le texte suivant définit précisément ce qu'est le daïmon: "je n'ai pas choisi ma vie avec ses manques et ses accomplissements. Elle est venue à moi avec un pouvoir qui n'est pas le mien. Tout ce à quoi je suis arrivé sert un projet que je n'ai pas prévu.Tout doit être réa­lisé et rien ne m'appartient".

C’est le génie personnel, à savoir, la sagesse que possède chaque individu de développer son propre caractère et son potentiel.