L'Animus négatif
à travers le conte de Barbe-Bleue
La condition féminine vu par Perrault
Présentation de l'atelier
L'animus négatif de la femme
Le narcissisme destructeur de la femme posséedée par un Animus négatif
Que dit le conte de Barbe-Bleue à ce sujet ?
« Il étoit une fois un homme qui avoit de belles maisons à la ville et à la campagne ; de la vaisselle d’or et d’argent, des meubles en broderies et des carrosses tout dorés, mais par malheur, cet homme avoit la barbe bleue ; cela le rendait si laid et si horrible, qu’il n’étoit femme ni fille qui ne s’enfuît devant lui. Une de ses voisines, dame de qualité, avoit deux filles parfaitement belles. Il lui en demanda une en mariage, en lui laissant le choix de celle qu’elle voudroit lui donner. Elles n’en vouloient point toutes les deux, et se renvoyoient l’une à l’autre, ne pouvant se résoudre à prendre un tel homme. Ce qui les dégoûtoit encore, c’est qu’il avoit déjà épousé plusieurs femmes, et qu’on ne savoit ce qu’elles étoient devenues. Barbe-bleue… »
Le personnage de Barbe-Bleue est présenté comme un homme très riche et très laid, éternellement veuf et qui plus est, cruel. Une très jeune fille naïve fascinée par ses richesses et ses attentions lors d’une promenade en forêt accepte sa demande en mariage. Aussitôt épousée, Barbe bleue lui annonce un voyage pour affaires et lui confie les clés de son château, avec l’interdiction formelle d’utiliser la petite clé du trousseau. Il met à la disposition de la jeune mariée toutes ses richesses et les nombreuses pièces de sa demeure, à l’exception de l’une d’entre elles. La jeune mariée consent à la proposition de Barbe-Bleue, invite ses deux sœurs et les voilà heureuses de festoyer et de partager l’abondance du lieu. Mais c’est oublier un peu vite la curiosité de la jeune femme, encouragée par celle de ses sœurs. Elle succombe à la tentation, cherche, teste tout le trousseau et enfin découvre le cabinet secret. Elle ouvre la porte et voit, épouvantée, les cadavres dépecés de plusieurs femmes. La clé tombe à ses pieds dans une mare de sang. Elle s’empresse de la récupérer. Trop tard la clé est tachée, et la trace de sa désobéissance est indélébile : la clé saigne, elle la cache en vain dans sa garde-robe, qu’elle va souiller. À son retour, Barbe-Bleue, qui n’est point dupe de la désobéissance de son épouse, ressert sur elle le piège qu’il lui avait tendu en lui réclamant les clés. Elle se confond en mensonges, plaide sa cause, mais ne peut échapper à la colère de son époux, qui lui signifie qu’elle va mourir instamment. Rusée, la jeune femme lui demande un délai pour se préparer à la mort et prier. L’accord donné par Barbe-Bleue à cette requête lui sera fatal, car les frères de la jeune épouse auront le temps d’arriver et de le passer au fil de leurs épées. Elle est sauvée, veuve et riche.
Quel est le Processus d'individuation de la jeune épousée par Barbe-Bleue ?
Le Processus d’individuation est entravé tant que la jeune fille fait les quatre volontés de barbe bleue, il lui faudra désobéir à ce tyran pour pouvoir s’individuer. Dès lors que la force de destruction de la psyché s’allie à l’Animus, les couches profondes de la psyché féminine sont sous l’emprise d’un masculin cruel qui s’emploie à la massacrer et s’oppose à toute individuation. Il la saigne et la met en pièces. Il détourne la femme d’une meilleure connaissance d’elle-même, en la séduisant par des richesses extérieures et en lui interdisant l’accès à ses richesses intérieures, qu’il s’emploie à éradiquer au fur et à mesure qu’elles émergent de son inconscient. L’Animus négatif n’est déjà pas un tendre, mais son association avec Thanatos, le prédateur naturel de la psyché, fait de lui un tueur en série : un vrai psychopathe qui participe activement à l’écosystème de la psyché de la femme, la proie dont il se nourrit pour se maintenir en santé. Ce qui fait dire à Jung que « l’Animus est un renard rusé qui sait comment effacer ses traces avec sa queue ». L’image est pour le moins explicite : la jeune épouse est naïve face à cette force archaïque et ténébreuse qui la séduit pour la détruire. Mais elle prend le risque de lui désobéir. Grâce à cette désobéissance, elle sort de la superficialité, de sa fascination pour les choses terrestres et le monde des apparences, pour entrer dans le monde souterrain, celui de l’inconscient que nous rappelle le cabinet secret. Elle y découvre avec horreur toutes les potentialités sauvagement assassinées et tous ses rêves brisés. Sa nature profonde est là, gisante et dépecée. Barbe bleue lui interdisait donc l’accès à une meilleure connaissance d’elle-même. Pourtant ce démon lui avait inspiré de la répugnance lors de leur première rencontre. Elle n’a point écouté sa nature instinctive, elle l’a même sacrifiée contre des rubans déposés dans ses cheveux et la perspective d’une vie bourgeoise et mondaine. Elle a échappé à ce tyran par une ruse salvatrice, et par le soutien de ses deux sœurs qui guettent l’horizon et appellent à la rescousse des nouvelles ressources : un Animus combattant et déterminé à en finir avec le bougre : les deux frères. Ils mettent du temps à arriver, car ils n’étaient pas assez proches de la conscience de la jeune femme. La voilà enfin débarrassée de son bourreau, libre de s’interroger sur elle-même, de se réapproprier la force, la conscience, l’intelligence dont cet Animus destructeur l’avait dépossédée et dont lui seul tirait profit.
Que désigne l'Animus négatif ?
L’Animus chez la femme est une des composantes majeures de la psyché androgyne. En effet la psyché est polarisée Masculin/Féminin et fait l’expérience sur le plan physique d’un corps sexué auquel elle s’identifie, oubliant l’autre moitié. L’Animus est donc le sexe inconscient de la femme comme l’Anima l’est pour l’homme. Cette autre moitié de la psyché de la femme agit à sa guise avec la complicité des complexes parentaux. L’Animus est un partenaire du Moi, mais la plupart du temps la femme attribue au Moi les réactions de l’Animus qui la possède.
Le Moi est une activité de la psyché qui a vocation à rendre compte de ce qui se passe à l’intérieur et à l’extérieur. Il est alors au service du Soi, et témoin de cet absolu en nous, dont il rend compte. Plus ou moins tôt sous la pression des évènements et de l’éducation reçue, il cesse d’être une activité de la psyché pour devenir une « entité » psychique que Jung nomme complexe ; apparaissent des petits « moi » multiples, autant de personnages auxquels nous sommes inconsciemment identifiés et qui s’emparent de nos vies à leur profit. Désormais le Moi a déserté l’intériorité. Il est exclusivement monopolisé par les exigences de l’environnement qu’il doit satisfaire sous peine d’exclusion, pense-t-il. Il est identifié à la Persona et c’en est fini de s’émanciper de la psyché collective.
Le Processus d’individuation est à l’arrêt. Pour activer ce processus, le Moi de la femme devra dans un premier temps se décoller de la Persona, se confronter à son opposé, l’Ombre, rencontrer l’archétype sexuel, l’Animus et ensuite se laisser orienter par le Soi. Le Moi dans son processus d’évolution sera mis en présence de chacun de ces partenaires, dans cet ordre. Ainsi, la femme, éprouvée par sa condition et son dialogue intérieur, entamera un dialogue avec son inconscient et suivra ce même cheminement. La rencontre avec l’Animus n’interviendra qu’une fois qu’elle aura exploré la partie inconnue d’elle-même, l’Ombre, dans laquelle l’Animus est tenu au secret, voire aux arrêts avec pour conséquences, des préoccupations narcissiques et superficielles qui occultent les aspirations spirituelles. Si le Moi ne s’émancipe pas des figures émergentes de l’inconscient (les archétypes) son activité consciente peut être altérée, jusqu’à perdre tout sens critique. Ainsi la femme possédée par l’Animus se met dans une position de dépendance vis-à-vis de lui : il lui impose depuis des siècles une façon de penser dépourvue de discernement à laquelle elle se soumet avec une docilité déconcertante. Attitude qu’elle reproduit avec ses partenaires extérieurs, faisant aveuglément confiance à leur autorité. La conséquence de cette attitude la maintient dans un état d’infériorité, qu’elle cherchera à compenser par des comportements de pseudosupériorité sur l’homme.
En quoi ce conte parle de la femme d'aujourd'hui ?
La femme qui persiste à rester la proie de l’Animus destructeur est victime de pensées autodestructrices, inhibantes et invalidantes, avec à la clé de sérieux troubles psychologiques et affectifs. Le conte de Barbe-Bleue indique clairement à la femme que l’Animus négatif n’est que la version accessible d’une force obscure et incontrôlable : le frontal n’est pas de mise, car l’ennemi est redoutable, et elle ne fait pas le poids. Le recours à la ruse est salvateur et il s’impose. Car Barbe bleue pour autant qu’il soit lui-même victime de cette énergie infernale n’en est pas moins une force brutale, archaïque et grossière. Son point faible est justement dans l’épaisseur de ses pièges : « tu as raison de douter, car tu es nulle » ; « ta vie est vide de sens » ; « tu n’as rien pour plaire à un homme », « tu n’as aucun avenir ». À l’entendre, il est facile d’en conclure qu’il n’a pas accès au subtil, il est malgracieux, autant physiquement qu’intellectuellement. La femme qui sait réattribuer à l’Animus négatif ces propos assassins fera preuve de diplomatie avec lui, consciente de l’ombre agissante de ce dernier, Thanatos en personne. Pour ne pas être broyée, la sagesse lui dicte de le laisser dire et de ne pas souscrire à ce qu’il dit. Là est le secret de son émancipation.
Qu'en pense Jung ?
Lorsque la femme est inconsciente de son animus, celui-ci s'unit aux charges émotionnelles non résolues et à son ombre.
Une union négative entre l’Animus et l’Ombre se manifestera par l’impatience, les supputations à propos d’une situation, les démonstrations de pouvoir, la confusion, de l’entêtement, des discussions sans fin, la rationalisation des sentiments, l’absence de spontanéité, et surtout une vampirisation de l’énergie de l’autre. La femme possédée par son Animus est en « rupture de noces » avec l’Animus archétype dont nous savons qu’il est source de vitalité, de renouvellement, de santé pour son psychisme. Elle est donc obligée d’aller pomper la vie là où elle se trouve: chez les autres. Cette femme-là est une véritable sangsue énergétique, redoutable dans ses relations, qu’elle épuise par des revendications, des plaintes, des procès d’intentions et des accusations. Car personne, jamais, ne répond à ses attentes, à ses besoins et cela depuis toujours. Alors qu’elle est irréprochable sur ce terrain. La relation est mise en échec dans la mesure où la relation consciente érotique avec l’autre est rendue impossible, y compris dans la réciprocité : l’Éros est détourné au profit d’une sempiternelle plainte, caractéristique d’un Animus mortifère.
Lecture complémentaire
L'Animus, "l'âmi" ou l'enemi de la femme
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